Club lecture – 4 février 2021
Les livres
- Buveurs de vent de Franck BOUYSSE
- Nature humaine de Serge Joncour
- Betty de Tiffany Mac DANIEL
- Par instants la vie n’est pas sûre de Robert Bober
- Et pourquoi moi, je dois parler comme toi ? Écrits bruts (et non bruts) réunis par Anouk Grinberg
- La vengeance m’appartient de Marie Ndiaye
- Impossible de Erri De Luca
- Patria de Fernando Aramburu
- Nature humaine de Serge Joncour
- Yoga d’Emmanuel Carrère
- Histoires à lire au crépuscule (nouvelles) de Chantal Detcherry
- Ça raconte Sarah de Pauline Delabroy-Allard
- Changer l’eau des fleurs de Valérie Perrin.
Les avis des lectrices
Annie :
« Buveurs de vent » de Franck BOUYSSE :
Roman à mi-chemin entre le conte et le western qui se déroule dans un lieu hors du temps, sous l’emprise d’un despote, Joyce, sorte d’ogre qui contrôle tout. Récit poétique, très sombre, mais à l’écriture flamboyante qui exalte la quête de liberté, la rébellion d’une fratrie affrontant la haine et le mal au sein d’une nature magistralement évoquée.
« Nature humaine » de Serge Joncour :
Roman retraçant, à travers l’histoire d’une famille d’agriculteurs dans le Lot, les évènements climatiques, politiques, sociologiques survenus entre 1976 et 1999. Le héros principal Alexandre est tiraillé entre le modernisme et la nostalgie de la vie paysanne de jadis quand les liens entre l’homme et la nature n’avaient pas été encore rompus. C’est une peinture assez triste du système productiviste qui entraine les paysans dans un engrenage fatal. Mais il y a aussi des pages lumineuses qui évoquent les champs, leur odeur, leurs couleurs, leur poésie. C’est cette nature-là « humaine » qui réconforte Alexandre et qu’il décide de retrouver, à la fin.
« Betty » de Tiffany Mac DANIEL :
La narratrice Betty (mère de l’auteur) évoque son enfance et son adolescence mais aussi celles de ses frères et sœurs et de sa propre mère. Betty est une jeune métisse Cherokee par son père. Elle est confrontée à des drames familiaux et au racisme à l’école mais elle puise sa force dans la culture ancestrale de son père, guérisseur, magicien des mots, créateur de mythes. Peu à peu, Betty en grandissant va découvrir de terribles secrets de famille qui expliquent les comportements étranges, irrationnels voire désespérés de certains membres de sa famille (sa mère Alka et sa sœur Fraya). Fantaisie et poésie contrebalancent la noirceur, la violence. C’est un roman bouleversant.
Maryse :
« Par instants la vie n’est pas sûre » de Robert Bober (né le 17/11/1931 à Berlin, réalisateur et écrivain français, auteur de nombreux films documentaires. Son roman « Quoi de neuf sur la guerre » a reçu le prix du Livre Inter en 1994)).L’auteur nous propose une déambulation sur son chemin de vie au gré de souvenirs qui émergent « en vrac ». Le support du récit est une lettre qu’il adresse à Pierre Dumayet avec lequel Robert Bober a beaucoup travaillé et qui est devenu un ami cher et vénéré. L’écriture toute en délicatesse donne un récit sur le fil d’une écriture humaniste, subtile. Souvenirs d’enfance, nostalgie de la vie de quartier de son enfance, à Paris La Butte aux Cailles, monde disparu, réflexions sur ce qu’est la lecture, littéraire (réflexion très alimentée par les points de vue de Dumayet) ou la lecture du Talmud, réflexion sur le souvenir, la transmission, sur l’histoire des juifs, animé par beaucoup de références, de citations, de photos.
« Et pourquoi moi, je dois parler comme toi ? » Écrits bruts (et non bruts) réunis par Anouk Grinberg (Éditeur Le Passeur). Un livre qui demande au lecteur de lâcher prise, de se rendre accessible… Il nous propose une plongée dans un monde inconnu et fascinant. C’est un recueil de textes qui furent écrits pas des « fous ». Ils nous donnent accès à une pensée jaillissante, exprimée sobrement ou par des mots « en cascade », échevelés, parfois incompréhensibles, mais qui captivent, souvent profondément poétiques ; témoignages touchants car ils nous transmettent une dimension humaine singulière et intense .Des textes très courts, des textes très longs, Ces textes sont introduits pas une photo et une petite biographie des auteurs qui nous permet de créer un lien.
Extraits :
- « L’écriture est mon arme secrète. J’adore appuyer sur la gâchette, balancer des munitions pour faire péter le son et me faire entendre…. » (Babouillec)
- Celui que j’appelais mon mari souffre d’une bronchite depuis le déluge et je ne sais pas quand cela finira. Les jours de maintenant sont des milliers de siècles, et plus nous allons, plus ils s’allongent ! Dire qu’un si petit corps a pu faire tant de ma (Anonyme)
Pour finir j’ai lu « La vengeance m’appartient » de Marie Ndiaye. Les critiques sont unanimement positives sur ce roman. Je suis passée complètement à côté ; je ne comprends pas le dessein de l’auteur et son style ne m’a pas touchée ?
Corinne :
« Impossible » de Erri De Luca : dans les Dolomites, un homme tombe. Derrière lui, un homme donne l’alerte Mais les deux hommes se connaissaient, ils faisaient partie des Brigades Rouges : celui qui est tombé avait, des années auparavant, livré ses camarades, dont l’homme témoin de sa chute, à la police,
Le récit retrace les échanges entre le juge chargé de l’affaire et le témoin de la chute.Grande tension dans le livre, échanges percutants entre le juge et le témoin, tous deux porteurs de valeurs différentes. Les conversations sont très justes, les réflexions sur la justice, l’amitié, l’engagement passionnantes, J’ai beaucoup aimé !
Patria de Fernando Aramburu : histoire de deux familles au Pays Basque espagnol déchirées par un drame ,L’auteur retrace le parcours des différents membres des deux familles,les victimes et les coupables, Il nous fait bien sentir la lourdeur de ces années 80, 90 , quand l’ETA commettait ses attentats,quand les espagnols se déchiraient,
C’est un roman dense (700 pages) mais la lecture est facile, Je n’avais personnellement pas lu de roman sur ce sujet,
Katy :
J’ai lu Nature humaine de Serge Joncour et je partage l’analyse d’Annie. Le climat de ces années 1976-1999 est très bien rendu, on sent qu’il y a du vécu par l’auteur (activiste ? observateur ?). Je rajouterai qu’en plus d’Alexandre il y a ses trois sœurs, pressées de fuir la ferme et la vie rurale, dès leur majorité, croyant en des lendemains enchanteurs… Cette rupture avec le milieu d’origine (sujet souvent abordé en littérature) crée à jamais un fossé entre les sœurs et leur frère ; pas de drame mais des scènes qui en disent long. Un autre personnage joue un rôle important, la jeune Allemande de l’Est, Contanze, belle, libre (libérée convient mieux), inaccessible, dont Alexandre sera toujours amoureux, même à (longue) distance, même sans espoir de la voir un jour s’installer avec lui.
J’ai lu également Betty de Tiffany McDaniel. Et là aussi je partage l’avis d’Annie. J’ai eu un peu de mal avec les premières pages, le chamanisme omniprésent n’étant pas ma tasse de thé. Mais on m’avait dit tellement de bien de ce livre que j’ai persisté, captée finalement par la force de ce texte, flamboyant parfois, déchirant souvent, d’une inventivité incroyable. L’amour du père et de sa fille, la « petite indienne » Betty, est magnifiquement restitué.
Yoga d’Emmanuel Carrère. L’auteur est égocentrique, c’est connu, il appartient à un milieu très privilégié, il le rappelle souvent, mais son écriture est tellement fluide, jamais lassante que je le lis toujours avec intérêt. Quand il parle de lui, Carrère parle aussi de nous et de notre temps. Il n’élude pas ses fractures, ses échecs. Se mêlent des situations présentes et des réminiscences, des souvenirs, des références. Roman ? Chroniques ? Récit de vie ? Témoignage ? Tout à la fois.
Histoires à lire au crépuscule (nouvelles) de Chantal Detcherry. Cet ouvrage a reçu le prix de la nouvelle de l’Académie française en 2020. J’ai inégalement apprécié ces 8 nouvelles dans leurs thèmes mais toutes sont gorgées de nature, d’amour de l’estuaire et des animaux, réels ou imaginaires qui peuplent ses rives. Ecriture très poétique, charnelle.
Ça raconte Sarah de Pauline Delabroy-Allard. J’ai retrouvé ce livre sur mes étagères en attente depuis 2018, acheté parce qu’il avait été couvert de prix. L’histoire d’une passion violente, destructrice, tragique, entre deux jeunes femmes (l’une enseignante, mère d’une petite fille, avec un compagnon, l’autre violoniste, libre, toujours en partance). Récit sombre, étouffant. J’ai lu un livre pour enfant de cette même auteure, doux et coloré, lui…
Josette B.
J’aurais un livre à vous conseiller qui m’a bien plu : « Changer l’eau des fleurs » de Valérie Perrin. C’est l’histoire d’une gardienne de cimetière, sa vie, ses drames avec un suspense … Allez voir les critiques sur le site « Babelio », je le conseille. Du coup, je me suis procuré le premier livre de Valérie Perrin « Les oubliés du dimanche ». Ce livre n’est pas tout récent donc devrait se trouver en bibliothèque, l’autre aussi d’ailleurs.
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